lundi 20 septembre 2010

activités en perspective

Les expositions en cours à l'Espace Duesberg rencontrent un beau succès !
Pour permettre à ceux qui n'en ont pas encore eu l'occasion de voir les photos de la Havane ainsi que le Mural pour la Paix (avant son départ pour le théâtre national de Bruxelles), une rencontre avec les artistes est organisée le samedi 2 octobre 2010 de 15 à 16 heures 30. Cette séance de clôture des expositions sera l'occasion de présenter les travaux réalisés en ateliers et d'expliquer la pédagogie appliquée. Réservation souhaitée pour le 29 septembre

Le 8 octobre 2010 à 18h30 aura lieu le vernissage de la porte de la paix d'Alain De Clerck (Espace Blavier, place du Marché à Verviers).

Les 16 et 17 ocotbre 2010 aura lieu la foire du livre politique à Liège.
Le samedi 16 après-midi, une visite en groupe est proposée. Nous serons accueillis par Jérôme Jamin qui a mené nos cafés citoyens au printemps dernier. Nous participerons à l'un des débats sur les thèmes suivants : modes d'expression culturelle des revendications des travailleurs (au départ de l'exemple liégeois dans les 70') OU l'avenir de la défense en Belgique (détails sur le site de la foire du livre).
Désignez le débat auquel nous participerons, à la majorité des opinions exprimées : inscrivez-vous provisoirement à l'un ou l'autre. Mention du résultat : le 13 octobre.

Le 29 novembre 2010, un covoiturage est proposé pour assister au café politique "Belgique, laboratoire de la désunion européenne" avec Jean-Pierre Stroobants, auteur du livre portant le même tire, correspondant du Monde à Bruxelles. Animation: Marc Vanesse (ULg). Inscription souhaitée pour le 25/11/2010

vendredi 10 septembre 2010

Pourquoi on parle le français (ou presque) à Verviers ? (I)

1ère partie : la colonisation romaine
Quelles langues a parlé la population de Verviers dans sa vie quotidienne (non pas la langue écrite, lue dans les livres, les journaux ou pratiquée dans les actes administratifs mais celle réellement usitée dans la vie courante) ?
La langue celte (ou gauloise, assez unifiée) a été présente dans la région pendant 1500 ans. Ensuite, à partir de la colonisation romaine, la langue évolué : d’abord en un mélange aux proportions incertaines entre le celte et le latin populaire, ensuite en un ‘dialecte’ roman local sous les Mérovingiens (qui n’a guère laissé de traces), puis, du milieu du VIIIème siècle jusqu’aux années 1980 (?), vers le wallon, avec une connaissance passive du français depuis 1250 tendant vers un bilinguisme de plus en plus soutenu, enfin vers le français (avec ses belgicismes) depuis 30 ans.
On constate qu’actuellement, le wallon recule à mesure de la disparition de la population la plus âgée et devient une langue morte, bientôt considérée comme patrimoine culturel. Le nombre de locuteurs en wallon a brusquement décliné entre 1930 et 1960, après des siècles de stabilité. La création de la Région wallonne, organe de l’Etat belge, n’a nullement enrayé la chute.
Verviers aurait pu devenir néerlandophone ou germanophone. Nulle prédestination en la matière : la langue est bien le produit de l’interaction entre les hommes.
Verviers est aujourd’hui proche de la frontière linguistique qui sépare le français de l’allemand. Dans le passé, elle en était plus proche encore.
Voyez l’étymologie de Stembert - stein berg, montagne de pierre, celle de Grand et Petit-Rechain - habitation (germanique, -haima) du riche, du puissant (germanique, rikja-). Plus à l’est, celle de Bilstain dont le nom signifie roche (-staina) en saillie (bili-). Ces noms ont été formés à la suite de la colonisation franque qui a poussé jusqu’au voisinage immédiat de Verviers sans vraiment s’y établir, indique Henri Pirenne.
Lorsque Jules César arrive près de Liège (-54), il y combat les Eburons (celto-germaniques), qui possèdent une forteresse à Atuatuca : peut-être s’agit-il de l’actuelle Tongres, située sur l’arrête séparant les bassins hydrographiques mosan et scaldien.
En peu de temps, Rome conquiert les Belges. Pendant trois siècles d’occupation romaine, les campagnes de la province sont au contact avec les légions et les colons qui sont venus vivre dans la région. La centralisation politique s’opère à partir de Tongres (qui sera finalement la seule grande ville romaine de l’actuelle Belgique).
Pour vivre, il faut savoir communiquer avec les occupants qui développent le commerce et l’industrie. Les colons romains parlent le latin vulgaire. Ce latin parlé, dépourvu du squelette de l’écriture, se différencie localement au contact avec le celticisme rémanent.
Par ailleurs, les Romains intègrent des dieux gaulois au Panthéon (telle la déesse Arduinna-la-Noire, chevauchant les sangliers, assimilée à Diane et source des célèbres Vierges noires).

La rurale et paisible Verviers a-t-elle échappé à la romanisation ? Certains auteurs estiment que les Romains n’ont été présents qu’à Tongres et dans quelques lieux, sans se répandre dans les campagnes. Pourtant, les traces archéologiques à Verviers ne peuvent qu’impressionner : une médaille en argent de l'empereur Hadrien trouvée en face du pont des Récollets ; une monnaie en or d'Antonin le Pieux au pied de la Montagne de Hombiet ; un trésor monétaire à Petit Rechain (50 pièces en argent, époques de Valérien et Gallien, Chaussée de la Seigneurie) ; des vestiges d’un cimetière romain en Terre Hollande ; plusieurs tombes romaines contenant des vases perdus par la suite, à l’exception de quatre acquis par J.S. Renier, actuellement au musée communal de Verviers ; quatre tombes romaines à Stembert (lieu-dit Trawa) qui fournit trois monnaies de bronze, une épingle en cuivre doré, quatre objets de bronze, deux en verre, une statuette, 26 poteries (beaucoup de ces découvertes furent abîmées durant ces fouilles d’une époque révolue) ; des vases romains trouvés à Heusy (Thiervaux, villa Laoureux) dans un tumulus aplani durant le chantier.


Au 1er siècle, Theux (appelé Tectis) et Juslenville possèdent une villa, des thermes, un temple dédié à Jupiter, Junon et Minerve, un cimetière belgo-romain (daté de 70-80 après JC). A Spa, nous découvrons d’autres souvenirs romains. A l’époque, Liège n’est guère plus développée : une villa romaine munie d’un hypocauste sur le site de l’actuelle Place Saint-Lambert.

Rien ne permet d’affirmer avec certitude que le celte aurait survécu dans les campagnes jusqu’à l’arrivée du christianisme qui fut pionnier en 330-350, mais qui ne se développa véritablement qu’après l’arrivée des moines de l’Abbaye de Stavelot à partir de 650. Le wallon ne dérivant pas du celte, mais bien du latin parlé, il faut bien envisager une longue pénétration des langues romanes dans les populations pour expliquer son essor dans la région, avant l’arrivée de l’ancien français (dialecte d’île de France, illustré par la Chanson de Roland).
A SUIVRE...

samedi 4 septembre 2010

Toponymie de Verviers

Une célèbre encyclopédie en ligne - qui pour beaucoup d’entre nous fait office de référence mondiale - nous livre deux étymologies contradictoires :
(1) « Le nom de Verviers pourrait provenir de l'anthroponyme Virovius, qui aurait donné le toponyme Viroviacus » (ndlr: ‘l’endroit du romain dénommé Virovius’, thèse détaillée plus loin).
(2) « L'élément ‘–viers’ se retrouve dans 3 communes du nord de la France : Louviers et Reviers (Normandie), ainsi que Grand-Laviers (Picardie). Il pourrait procéder de l'élément (celtique ?) ver/var, hydronyme assez commun ». Exemple : le Var, fleuve qui se jette dans la Baie des Anges à côté de l’aéroport de Nice, terre des Celto-Ligures. On retrouve aussi la racine ‘ver’ dans Warvick, ville d’Angleterre. Ladite racine se rattache au sanskrit vā́r et au tokharien wär « eau » (langues indo-européennes).
Dans Etudes étymologiques & linguistiques sur les noms romans et bas-allemands de la Belgique (1880), G. Bernaerts évoquait p. 316-317 la similitude de l’étymologie de Verviers avec celle de deux autres villes d’origine romaine : Vervoz (commune de Clavier) et Wervik/Wervicq-Sud (près de Mouscron, à cheval sur l'actuelle frontière franco-flamande).
Dans son Dictionnaire des noms de lieux en Wallonie et à Bruxelles (2005), Jean-Jacques Jespers avance que Verviers et Vervoz proviendraient tous deux de 'Viroviacus', mot gallo-romain composé de Verôvos (excellent, en celte) et -acus (terre, lieu), et signifieraient donc ‘très bonne terre’.
En ce qui concerne Verviers, cette thèse innove, les linguistes affirmant généralement que le suffixe ‑acus s’est adjoint au nom du propriétaire romain pour désigner son domaine : on dit qu’à l’origine, Verviers était le domaine de Virovius qui exploitait une ferme-villa sur l’emplacement actuel de la Place du Marché, la Summa Villa fondatrice de Verviers, à l’image du Palatin romain.
Wervik/Wervicq-Sud est nommée 'Viroviacum' par l’Itinéraire d’Antonin et 'Virovino' par la table de Peutinger. Wervik serait une des plus vieilles villes de Belgique ; sur la route romaine de Tournai à Kassel, elle figurait dit-on comme un lieu de repos. C’est là que la chaussée romaine traversait la Lys.


De son côté, Vervoz est nommée 'Vervigum' dans les textes chrétiens latins du Moyen-âge (862). Vervoz était située sur la route romaine reliant Dinant à Cologne.

A notre connaissance, il n’existe pas de document d’époque qui désigne Verviers sous le toponyme ‘Viroviacus’. Sous l’empire romain, Verviers était un obscur hameau. Aucune variante de Verviers n’apparaît non plus à l’époque franque, comme c'est le cas pour Wervik ('Viroviacensis'). Verviers n’apparaît qu’au XIIème siècle sur un document de l’Abbaye de Stavelot.

Ne doit-on pas s’étonner, si l’on accepte 'Viroviacus' (et sa variante en -acum) comme le nom porté sous l’empire romain par trois bourgs belges, que l’on puisse retrouver aux trois endroits un personnage romain nommé Virovius, suffisamment important pour qu’on parte de son patronyme pour nommer son domaine et plus tard son voisinage ?

En réalité, le sens du suffixe –acus est d’usage plus large qu’en référence à un propriétaire romain : le toponyme 'Andoliacus' (actuellement Andouillé près de Laval) en témoigne, qui a trait au mot celte « dol », signifiant ‘méandre’ ; de même, le mot celte 'condate' qui préside à la destinée de 26 Condé du nord de la France signifiait confluent (au Moyen-âge, on écrivait Condacum ; voir Kontich en Belgique, au confluent Rupel/Nèthe).

On remarquera avec amusement l’initiative consistant à considérer le Viroviacum de Wervik comme un hommage à un chef de village celte vaincu, Verovos dont l’existence reste mystérieuse.

Retenons, en oubliant l’imagination des faiseurs de légendes (bien que celle d’un futur Saint Remacle détruisant le temple de Diane sur la Place du Marché nous plaise particulièrement), que Verviers était certes un obscur hameau, mais que les Gaulois le désignaient déjà comme une excellente terre. Ce qui est du reste une pure vérité !

dimanche 29 août 2010

Cité lainière

Châteauroux, ville de 47.000 habitants, située au sud-est de Bourges, entre la Brenne et le Berry (ville d’enfance et de jeunesse de Gérard Depardieu), évoque Verviers à l’occasion des Journées du Patrimoine qui s’y dérouleront les 18 et 19 septembre prochain. Elle accueille une exposition itinérante, Châteauroux et les cités lainières d’Europe - découverte d’un patrimoine industriel commun : 14 villes drapières d’Europe sont illustrées par près de 700 photographies.
En 1856, Pierre Balsan, industriel héraultais, a créé à Châteauroux une industrie du drap de laine parmi les plus importantes - six hectares d'usine - et les plus modernes du pays. En 1910, les établissements Balsan occupaient 1200 travailleurs. L’usine a été fermée en 1982, la société transférée à 15 km de la ville ; reprise dans le groupe belge Associated Weavers (Renaix), l’activité est passée du drap (le « bleu horizon » militaire de la 1ère guerre mondiale) à la moquette de qualité.
L’industrie lainière de Châteauroux se voulait proche de la source. (L’Encyclopédie de Diderot mentionne : « Le Berry & le Beauvoisis sont de tout le royaume les lieux les plus garnis de bêtes à laine »).


On peut en dire tout autant de Verviers. L’Atlas des paysages de la Conférence Permanente du Développement Territorial (2007, Région wallonne) note : « A partir du 15e siècle, la fabrication et le commerce du drap prennent une certaine importance dans la vallée de la Vesdre, à Verviers et à Eupen. A cette époque, la laine provient de l’élevage des moutons qui parcourent les landes abondantes dans cette région. Utilisant la force motrice de l’eau et le charbon de bois des forêts voisines, des moulins à fouler la laine s’égrènent dans la vallée. Certains sont des anciennes forges transformées suite à une interdiction de forger des armes faite à la population par les ducs de Bourgogne. »
Après des siècles d’artisanat, sous Napoléon, l’industrialisation déferle sur Verviers, brisant le monopole anglais. Cette histoire nous est racontée par plusieurs auteurs : Antoine Gabriel de Becdelièvre-Hamal – 1836, Charles Ballot - 1923, Pierre Lebrun - 1948, Louis Bergeron - 1971, Claude Desama – 1985, Gérard Gayot - 2002, Eliane Gubin – 2006.
Quel aurait été le développement de Verviers et de ses environs si Henri Mali, représentant les intérêts de Marie-Anne Simonis (épouse Biolley) et son frère Iwan, n’avait pas, lors de son passage à Hambourg, montré de l’intérêt pour la proposition de William Cockerill, rencontré par hasard, qui avait déjà échoué à faire des affaires en Suède et en Russie ?
La proposition de William Cockerill visait à opérer une immense économie de main d’œuvre et de temps : « L’innovation technique qui a tout déclenché (ndlr : la technique était connue en Angleterre depuis longtemps), c’est l’assortiment de William Cockerill, cette combinaison de mécaniques, mue par la force hydraulique et opérationnelle à partir de janvier 1801, composée d’une machine à drousser (…) pour le cardage en gros et le mélange des couleurs, d’une machine à carder pour le cardage en fin, d’une machine à filer en gros (…), et de quatre machines à filer fin (…). Prix 12 000 F ». (Ndlr : la fortune de la famille Simonis à l’aube de la révolution industrielle est évaluée à 4 millions de francs).
Adriaan Linters rapporte que la machine à carder et la machine pour filature de gros remplacent chacune 24 ouvriers, les machines à filer fin remplacent chacune 24 ouvriers, soit une économie de 144 emplois. Gérard Gayot précise, page 11 de son passionnant article : « Pour un assortiment en fin, il faut 10 personnes, (…) un homme pour placer la laine sur la table (un drousseur), un homme pour filer en gros, trois garçons ou filles de 10 à 13 ans (…) pour mettre la laine cardée sur la machine à filer, 4 garçons ou filles de 16 à 18 ans (…) pour filer en fin, une aspleuse. Ces dix personnes, dont sept adolescents et enfants font le travail de 50 à 70 personnes ».
Vendue d’abord aux Simonis et aux Biolley en 1801, la machine se répandit parmi tous les drapiers, notamment grâce à James Hodson, gendre de William Cockerill. En 1810, Verviers était devenu le premier centre continental de la draperie cardée.


Jean Knott retrace la suite de l’histoire de la cité lainière : Verviers connut une reconversion à partir de 1850 en se spécialisant dans le traitement de la laine. L'expansion se fera de manière décisive après 1860, par l'exploitation de nouvelles ressources lainières venues d’Amérique du Sud, d’Afrique du Sud et d’Australie, et la mise au point de nouvelles technologies, plus particulièrement celles se rapportant à la préparation de laine avant transformation (le lavage, l'échardonnage, l'épaillage chimique ou carbonisage). En 1900, la production mondiale de laine était de 730.000 tonnes dont 110.000 tonnes étaient traitées à Verviers soit 15 % de la production mondiale. 1912 fut l'année record avec 112.000 tonnes de laine exportée, ce fut également la dernière ‘bonne année’. L’introduction des premiers détergents en 1910, qui ne nécessitent plus, comme pour le savon, l'utilisation d'eau douce, a eu raison petit à petit des atouts de la région en matière de qualité des eaux. Le traitement de la laine se fit sous d’autres cieux et la laine elle-même fit place à d’autres fibres.

mardi 24 août 2010

Un programme culturel intense pour la rentrée!

Ce samedi 4 septembre 2010, de 16 à 18 heures, l'Académie des Beaux-Arts de Verviers vous invite au vernissage de l'exposition 'Autour d'un Verre d'eau' (mais... il n'y aura pas que de l'eau!), qui nourrit la réflexion que nous mènerons sur la situation au Proche-Orient, avec une attention particulière portée à cette ressource essentielle qu'est l'eau. Formalim, centre de formation aux métiers de l'eau, partenaire dans cette activité, accueille chaleureusement cette exposition du 4 septembre au 1er octobre 2010, rue de Limbourg 41B à Verviers. L'exposition est riche en oeuvres de grande qualité, sélectionnées parmi les meilleures réalisations des "académiciens" !

Le dimanche 5 septembre 2010, rendez-vous à 10 heures 15 à la gare centrale de Verviers ou à 11 heures 50 au Parking B7 (Faculté de Droit) au Sart-Tilman, pour une visite guidée par Françoise Debauve, professeur d'Histoire de l'art à l'Académie des Beaux-Arts de Verviers. Les concepteurs du campus du Sart-Tilman innovèrent en introduisant l'art dans le quotidien ; nous découvrirons les expériences des plus grands noms de l'architecture et de l'art belge contemporain tels que Charles Vandenhove, Pierre Alechinsky ou Jo Delahaut.
Il est prévu que les verviétois seront à temps pour assister au Premier Dimanche du Mois au Musée des Beaux-Arts de Verviers, à 15 heures.

Le vendredi 10 septembre 2010 à 17 heures 30, vernissage des expositions "Paysages humains, Visages urbains", photographies du muraliste mexicain Adrian Jurado et de la photographe verviétoise Héloïse Vande Wiele et "Mural pour la Paix" du même Adrian Jurado.
L'exposition est réalisée grâce à la collaboration avec la Maison de l'Amérique latine à Bruxelles.
Le vernissage aura lieu à l'Espace Duesberg à Verviers en présence des artistes.
Des ateliers pour enfants de 5 à 10 ans auront lieu les dimanches 12, 19 et 26 septembre 2010 à 13h et à 15h30, sur réservation.
Paysages Humains, Visages Urbains est une sélection de photos sur la thématique urbaine, humaine et contextuelle de la Havane par deux artistes qui ont pour objectif de rendre compte de l’appropriation de l’espace public, lequel peut être converti en un prétexte pour créer l’art à partir de rien.
Ils aiment à combiner à leurs expositions d’autres formes d’expression artistiques, mises à contribution pour renforcer l’esprit d’appropriation, telle la danse urbaine.
Adrian Jurado pratique par ailleurs la peinture murale. Discipline caractérisée par le grand format, elle se distingue fondamentalement du graffiti, comme aime à l’expliquer l’artiste.
Avec la verviétoise Héloïse Vande Wiele, ils présentent un travail commun et une œuvre qui lui est complémentaire, fondés sur une même conscience de l’espace et de ses habitants.
Le Mural pour la Paix est une peinture portable de 10 mètres de long sur 2 mètres de haut, inspirée par la guerre en Irak, retravaillée cet été en vue de son exposition à Verviers.
Adrian Jurado évolue sans cesse, livrant une production artistique techniquement des plus intéressantes, mêlant un faisceau d’influences allant de la fresque au cinéma, inspirée des grands sujets de préoccupation de l’humanité (guerre, souffrance) ou sociaux (consommation, solitude). Ses derniers travaux l’ont mené à s’intéresser davantage aux lieux, à l’emprise du temps, aux évolutions de nos paysages urbains.
Il ne faut rater sous aucun prétexte la possibilité offerte aux verviétois(es) de dialoguer avec les deux artistes, car s’ils expriment l’essentiel au travers de leur art, ils expliquent de façon captivante leur conception d’un art engagé.

lundi 23 août 2010

Les trésors de la littérature de Verviers et environs.

Guy Delhasse propose ce mercredi 25 août 2010 une promenade littéraire et musicale sur fonds de textes d’auteurs verviétois et de souvenirs de Pierre Rapsat. L’initiative prépare la sortie d’un guide littéraire de Verviers (avec Dison, Pepinster et les Fagnes) le 16 octobre prochain. Guy Delhasse a déjà publié les guides littéraires de Huy, de Liège et de Spa. L’auteur convie le public à marcher dans les rues à la recherche des écrivains et romans du passé et du présent. « C'est l'art de la rue au service de la littérature », confie-t-il dans les pages de Best-of-Verviers, et ajoute : « A Verviers, plusieurs romans évoquant la ville viennent de sortir. Il y a vraiment de l'écriture, du dynamisme littéraire à Verviers. »
L’annonçe de la promenade mentionne des noms d’auteurs, avec trois petits points :
Christian Beck (1879-1916). André Blavier parlait de lui en ces mots: « J'ai été attiré par lui par ce qu'on pourrait appeler la légende Christian Beck. Je savais qu'il était le prototype du singe papion Bosse-de-Nage dans Faustroll (Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien de Jarry, 1898 - ndrl) ; je savais que Gide l'avait mis en scène (en Lucien Bercail, personnage inquiet, tributaire du regard de l’autre, dans Les Faux Monnayeurs, 1925 – ndlr) ; je savais que ce petit Verviétois, parti avec beaucoup d'insolence inconsciente à la conquête de Paris, avait été, au début, très favorablement accueilli par les plus grands: Verhaeren, Maeterlinck, Claudel (…), Jarry – Jarry, dont il semble avoir été le meilleur ami pendant un temps, et là on ne s'explique pas la rupture qui semble s'être produite, sinon peut-être par le fait que Beck était peut-être, de tous, celui dont le comportement singeait le plus exactement celui de Jarry… ce qui a pu agacer l'un ou l'autre».
André Blavier (1922-2001). Il n’est pas à présenter. Son ouvrage de référence s’intitule
Les Fous Littéraires, paru pour la première fois en 1982, revu et enrichi en 2001 par les Editions des Cendres. Cette «encyclopédie» contient plus de 1.000 pages où sont recensés plus de 3.000 auteurs. Dans l’ouvrage, il cherche à rassembler ceux qui n'ont réussi à obtenir aucune reconnaissance, ni par la communauté intellectuelle (sauf exceptions), ni par le public, ni par la critique, publiés souvent à compte d'auteur, et qui traitent de sujets considérés comme très décalés ou désopilants, sans toutefois que ce soit leur intention. « Come fare a raccogliere millecinquecento opere di pazzi letterari? È il compito di una vita, e l'opera di un genio. », écrit Umberto Eco.
Albert Bonjean (1859-1939). Avocat connu pour être le chantre des Hautes Fagnes et pour sa légende controversée de Michel Schmitz, égaré miraculé. En face de la Baraque Michel, une stèle évoque l’écrivain qui parraina en 1935 l'ASBL «Les Amis de la Fagne». Albert Bonjean est cité comme promoteur du remplacement en 1931 de la Croix des Fiancés (datant de 1893) à la borne-frontière 151 (ancienne frontière entre la Belgique et la Prusse). La croix de 1931 a été remplacée en 1984 et se trouverait, selon Stéphane Rood, au ‘Musée de Verviers’.
Adolphe Hardy (1863-1954). Ami du précédent, poète, écrivain, journaliste, mieux connu grâce à la Fondation Aldolphe Hardy à Dison. En 1906, le poète Frédéric Mistral écrit à Hardy : « J’ai suivi avec plaisir La Route enchantée que vous avez ouverte et découverte... elle est douce et fleurie, claire comme l’eau pure. » Autre lettre de Mistral en 1910 : « ... votre poésie naturelle, fraîche et pure comme l’eau de source est née pour plaire, elle est claire et limpide et classique en tout le paysage qui l’a fit éclore et apprécier dans sa couleur et sa simplicité». Lisez également une présentation sur un document d’époque (page 18).
Léon Norgez. Auteur proche de Paul Biron, analyste des aventures de Mon Mononke (Portrait de Mon Mononke, 1981). Auteur de Brioche & Cie encagés (1955) - Norgez fut prisonnier au Stalag IX-A à Ziegenhain -, d’En ce temps-là, Elisabeth (1973) et d’Aux racines des Etoiles (1976).
Joseph Ozer. Auteur de romans de scoutisme. Egalement : La légende merveilleuse de Godefroid de Bouillon (1938) - Le Bouquet de Linaigrettes (1958).
Arnold Couchard qui vient de publier Dérisoires supputations, est l’organisateur de la manifestation – « Au rendez-vous des écrivains » – qui réunit tous les deux ans à Verviers, des auteurs de la région.
Pour poursuivre la liste ébauchée dans l’annonce de la promenade de Guy Delhasse suivant le travail de la Fondation Hardy, citons :
Luc Hommel (1886-1960), auteur en 1922 de
La Boutique Crickboom, où « il relate en une écriture fine et distinguée des souvenirs d'enfance se déroulant au pays de Verviers ». Henri-Jacques Proumen (1879-1962), connu pour sa connaissance de la science-fiction. Martin Lejeune (1859-1902), poète et auteur wallon. Maurice Beerblock (1880-1962), poète de saynètes à la nostalgie d’une musique de chambre (voir Lettres françaises de Belgique: La poésie, Robert Frickx, Raymond Trousson, 1994). Armand Carabin (1907-1987), auteur d’un Verviers Littéraire Anecdotique (1981). Il y a lieu d’ajouter à cette liste, pareillement, des points de suspension…

vendredi 20 août 2010

Faut-il sauver les belgicismes (francophones) ?

Chaque année, il est fait une grande publicité à propos de l’entrée de belgicismes dans les dictionnaires français, considérée comme la preuve indiscutable d’une reconnaissance officielle sinon de nos particularismes linguistiques, de nos besoins spécifiques : que vaudrait dans nos contrées un dictionnaire qui ne nous aiderait pas à définir nos usages du chicon, de la drache, du logopède, de la margaille, de la tirette et d’autres carabistouilles ? La Communauté française de Belgique est un marché à ne pas négliger.

C’est à sa collaboration avec le centre de recherche Valibel (Variétés Linguistiques du français en Belgique, basé à l’UCL) que le Petit Robert doit son enrichissement à avoir accueilli dans son édition 2008 brol, chipoter, copion, guindaille, vidange (dans son sens de bouteille consignée), etc.

Mais il faut bien de constater que les belgicismes aimablement officialisés sont peu nombreux eu égard à l’amplitude de nos régionalismes. Si bien qu’en parallèle, la Belgique francophone continue à produire à foison d’engageants dictionnaires des belgicismes, à la recherche de l’exhaustivité (2200 items pour le Dictionnaire des belgicismes, Michel Francard et al., août 2010). Dans ces ouvrages, le belge francophone se retrouve vraiment chez lui, se régalant d’une auto-reconnaissance complète de son langage autonome. On n’est jamais mieux servi que par soi-même.

De la sorte, le belge francophone prend sa revanche sur le discours puriste. Il marque ses frontières. Il proclame ses distances. En 1806, Antoine Fidèle Poyart publiait un recueil intitulé : Flandricismes, wallonismes et expressions impropres dans le langage français, ouvrage dans lequel on indique les fautes que commettent fréquemment les Belges en parlant l'idiome français ou en l'écrivant; avec la désignation du mot ou de l'expression propre, ainsi que celle des règles qui font éviter les fautes contre la syntaxe.
Poyart était un citoyen né à Arras, venu enseigner à Bruxelles à une époque où la Belgique n'avait pas encore accédé à l'indépendance et était sous la domination française. Il s’agissait pour lui d’amener le français des Belges au niveau de celui des Français « de souche », tous étant alors réunis dans la même nation.
A titre d’exemple, Poyart récuse l’usage de verbe dormir à la place du verbe coucher. « J’ai dormi chez mon frère » (d’usage en Belgique) doit se dire « J’ai couché chez mon frère », puisque le verbe dormir ne peut se rapporter qu’à l’état de sommeil, tandis que le verbe coucher a trait à l’action de passer la nuit. La nuance est fine et non dénuée d’ambigüité.

Napoléon ayant été défait à Waterloo, l’idiome belgo-français mérite aujourd’hui d’être étudié avec davantage de profondeur. L’étymologie de ses mots et de ses acceptions est souvent introuvable (à l’exception des flandricismes plus aisément identifiés).

Mais à force de recevoir la consécration, les belgicismes deviennent de redoutables pièges lorsque les Belges entrent en contact avec des Français. Progressivement, le belge francophone ne se rend plus compte qu’il est devenu énigmatique car tous ont déserté le triste devoir de lui rappeler que nombre de ses expressions relèvent du sabir si elles sont entendues hors du pays.

Sur un autre registre, l’expérience de Maître Misson est amusante.

Et quel supplice pour l’écrivain belge francophone qui se doit d’extirper de son œuvre toute trace de belgicisme quand il veut être compris du public français ou lu sans trop de condescendance.

Le débat est certainement infiniment plus complexe.

* L’éminent sémioticien d’origine verviétoise, incidemment conseiller du Larousse, Jean-Marie Klinkenberg, plaide pour le polycentrisme linguistique et donne des leçons sur le thème de l’écriture qui échappe à la langue.

* A-t-on le droit de « mal écrire », s’interroge bien à propos le suisse Jérôme Meizoz.